Le 27-08-2009 • Pays : Mongolie
Le Mongol Rally, c'est pas qu'une histoire de riches occidentaux qui partent à l'aventure à l'autre bout de la planète. En dehors de la page dédiée au sujet de l'association, on en a peu parlé sur notre blog mais le Mongol Rally vise à rassembler de l'argent pour un certain nombre d'associations caritatives. Chaque équipe a l'obligation de récupérer 1000 £ (environ 1150 euros)... Certaines équipes ont déjà récupéré le double ou le triple de cette somme.
L'association pour laquelle nous avons décidé de concourir s'intitule The Christina Noble Children's Foundation (CNCF). Cette association s'occupe d'aider des enfants défavorisés en Mongolie et au Vietnam.
En Mongolie, ils travaillent autour de trois axes:
* Donner des gers (Yourtes) aux plus pauvres via le programme Give a ger,
* soigner les plus défavorisés,
* gérer des Ger Villages pour des enfants
Depuis le début de notre projet, nous avions en tête d'aller rendre visite aux enfants du Ger Village d'Oulan Baator. Arrivés, nous avons tenu notre promesse.
Personnellement, même si je suis intéressé par ce genre de projet, j'avoue que j'étais assez mal à l'aise par le mélange des genres. Le Mongol Rally reste une aventure pour des gens aisés dans un but essentiellement de divertissement et de vacances hors normes (et je ne parle même pas de l'impact sur l'environnement ... discussion qui a fait l'objet de nombreuses heures dans la voiture). Aller rencontrer quelques heures des enfants ayant vécu des expériences particulièrement horribles alors que je viens de passer 6 semaines géniales à visiter le monde ne sied pas vraiment à ma conscience.
La matinée de notre première journée à UB se déroule cependant de manière plus classique. Pas besoin d'enchaîner les kilomètres, pas besoin d'avoir une carte en tête dès le réveil.
Rodolphe avait promis d'offrir le petit déjeuner dans le bistrot français d'UB si on arrivait à terminer le Mongol Rally. Chose promise, chose due. On déguste café au lait, chocolats chaud, croissants et pains au chocolat. Comme à la maison. Ça change du fromage mongol et de la viande bouillie/séchée.
On retourne à la voiture pour aller à la ligne d'arrivée. Notre objectif final depuis 6 semaines. On arrive proche de la ligne... Gaetan et Rodolphe s'assoient sur les fenêtres pour fêter ça. Un policier nous arrête. "Et votre ceinture ?", "Mongol Rally, Finish line over there". Aucune expression sur son visage. Ils rentrent dans la voiture. Il nous laisse passer sans soucis. Ça aurait été dommage de se prendre un PV à 10 mètre de l'arrivée.
Quelques autres véhicules sont sur la ligne d'arrivée où elles sont préparées pour être redonnées... la plupart sont dans des états équivalents au notre ... Série de photos devant notre Skoda et la ligne d'arrivée. On est content d'être là. On s'amuse à prendre des séries de photos devant notre véhicule. On blablate avec un des organisateurs.
On récupère les informations pour aller voir le Ger Village de Christina Noble. Il faut faire un crochet par le bureau en ville. On nous indique le chemin. C'est pas gagné.
Heureusement, on trouve rapidement. On commence à avoir de l'expérience dans la circulation en ville. J'ai
pas tenu de compte mais le nombre de villes traversées doit se chiffrer
par centaines... Le quartier est particulièrement glauque. Un veau mort depuis quelques jours montre l'entrée du chemin défoncé.
Une autre voiture du Mongol Rally est là et est sur le point de partir. On est accueilli chaleureusement par Edward, Irlandais qui gère le village depuis 5 ans. Mélange de mon ancien boss en Australie pour le coté accessible, bon vivant et agréable et de John Mc Cain pour le physique et l'aspect bon enfant. Inspirant la confiance dès les premières paroles, mes inquiétudes disparaissent immédiatement. Le camp est composé de 10 gers d'habitation. 6 enfants vivent dans chaque Ger. Chacune est géré par une femme. L'aménagement respecte les traditions mongoles. Les lits entourent le poêle situé au centre de la ger.
Le village a aussi une salle de spectacle, deux serres, un jardin ("I am Irish, therefor, we are growing some potatoes" - "Je suis irlandais, donc on fait pousser des pommes de terre"), une crèche, une grande yourte où les enfants se réunissent le week end pour faire leurs devoirs et un poulailler avec 9 poules (les poules ne passant pas l'hiver à cause des -40°C, elles produisent pendant l'été des ½ufs et servent de repas de noël à la fin de l'année).
Edward nous fait visiter le village. Notre premier arrêt est à la salle de spectacle, c'est encore les grandes vacances et de nombreux enfants les occupent à faire de la musique ou du chant. La plupart d'entre eux jouent des instruments typiques mongol. Edward nous implique qu'outre l'aspect culturel, ces activités sont cruciales pour que les enfants puissent retrouver une confiance en eux. On est placé au milieu de la salle. La dizaine d'enfants jouent chacun les uns après les autres de leur instruments respectifs. Nous sommes touchés par l'attention d'autant qu'ils ont un talent certain. Trois jeunes filles jouent d'une sorte d'harpe mongole, deux autres d'une guitare mongole, un enfant chante une chanson mongole et un autre interprète du Bach au piano.
Ensuite, le professeur de danse est ravi de nous montrer des photos de sa (visiblement) glorieuse carrière de danseur.
Edward nous ouvre les portes des différentes gers. A la manière mongole, il entre sans frapper et s'assoie au centre de la pièce même si il y a des gens. La première est celle des filles les plus âgées. Entre 14 et 16 ans, elles sont quasi autonomes. Elles gèrent elle-même leur propre ger. Je les perçois plus autonomes et plus proches de la société occidentale que les jeunes filles de la campagne mongole prolongeant les clichées de la femme soumise.
On visite une autre ger. Sur le chemin de celle-ci, Edward nous présente des enfants de tout âge et sexe. Pour chacun, il nous explique la raison pour laquelle il se trouve dans ce village. Chacune des explications est un coup de poing. Infanticides dû à l'impossibilité de nourrir ses propres enfants (pratique courante en Mongolie à cause de la dureté de la vie), incestes, viols, mauvais traitements... Malgré tout, les enfants sont tellement souriants, tellement biens dans ce village que l'on en vient à ne pas être miné par la dureté des propos et des images...
Edward doit partir, on l'accompagne à l'entrée du village. Sur le chemin, on lui dit que l'on a plein de choses à leur donner... On pensait qu'ils ne seraient intéressés que par une poignée de choses (couverture, nourriture). Finalement, on se retrouvera à vider quasiment toute la voiture... Huiles, bidons d'eau et d'essence, les pâtes que Rodolphe n'aura pas dévoré, notre tente, la boite à outils qui amènera un grand sourire sur le visage du chauffeur. Sachant que tout le village fonctionne grâce au Mongol Rally, on met beaucoup d'ardeur pour donner tout ce qui pourrait leur être utile.
Mais le clou de nos dons est surtout le canard. Ce dernier trône fièrement sur le toit de notre voiture depuis que l'on a retrouvé Gaëtan à Almaty. Devenu notre emblème, le voir partir dans la main des enfants nous fait grand plaisir. Je m'excuse à Edward du peu d'intérêt de certains produits. Il nous rassure en nous disant qu'il a probablement chez lui l'objet le plus inutile de Mongolie... Une équipe, il y a quelques années, lui a ramené une planche de Surf... Quand on sait que le point le plus éloigné de la mer se trouve en Mongolie ...
Il faudrait des pages pour retranscrire toutes les informations et les émotions transmises par Edward... En quelques heures, il a su nous donner une nouvelle perspective sur notre aventure... Plus humaines, plus proche d'une certaine réalité...
Edward s'en va et nous indique que l'on peut rester le temps que l'on veut et faire ce que l'on veut. Gaëtan et moi jouons à nous faire coiffer par deux petites filles pendant que Samuel prend sa raclée au basket. Nous restons quelques heures en compagnie des enfants à jouer au ballon, prendre des photos...
Je met du temps à digérer ces rencontres.
Ces visages souriants de ces enfants viennent s'ajouter aux nombreuses rencontres faites au long de notre voyage. Je repense aux vies de chacun que l'on a croisé pendant quelques minutes où quelques heures. Le météorologue tadjik supportant avec ses 7 enfants les vents et les basses températures de l'hiver, le Kazak typé perse bloqué avec nous dans le no man's land Kazakhstan / Ouzbékistan, le Mongol pris en stop pendant 3 heures à 20 kilomètres/h dansant dans la voiture sur du Gilbert Montagné, les innombrables enfants venant vers nous avec des grands sourires, le plaisir du patriarche tadjik nous faisant l'honneur d'égorger un mouton, l'infirmier kazak francophone qui nous racontera sa vie à Almaty sur la route de l'hôpital ...
Un peu de publicité pour terminer.
Si vous voulez aider l'association Christina Noble, n'hésitez pas à aller faire un tour sur la page don. Si vous faites le moindre don, merci de leur indiquer le nom de notre équipe "The Frogs go Wildeast" et/ou nous envoyer un mail à mongolrally@kikooboo.com. Comme pour la plupart des projets de ce genre, vous pouvez déduire une partie des sommes données de vos impôts.
Merci pour eux. L'argent sera utilisé à bon escient !